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De quoi j'ai peur

Bon,

mieux vaut commencer par un aveu :

je suis un peu trouillarde,

j’ai mes petites peurs.

Et vous allez vous moquer de moi quand vous saurez ce que je crains surtout.

C’est…

eh bien,

c’est…

(Je vais prendre mon courage à deux mains et le dire d’une bonne fois.)

J’ai une peur bleue du…

Saci-Pererê !

Ouf !

l’avouer m’a soulagée. Et remplie de honte.

Si je ne jure pas que le Saci existe, c’est juste parce qu’on ne doit pas jurer en vain.

Vous êtes probablement de la ville et vous ne me croyez pas. Mais c’est sûr :

un saci vit dans la forêt.

 Et je garantis cette vérité qui a tout l’air d’un mensonge, je le garantis parce que j’ai déjà vu cet être

mi-personne mi-animal.

Et parce que je veux que vous me croyiez, je vais vous le décrire :

c’est un petit diable qui n’a qu’une jambe

(que miraculeusement il peut croiser).

Je vous donne ma parole d’honneur que c’est vrai.

Et il a toujours une petite

pipe à la bouche.

Je dois ajouter qu’il n’est pas du genre à faire de grandes méchancetés.

Seulement des petites,

toujours malicieuses.

Parfois, pour ne pas lui refuser du pétun, il vaut mieux avoir du tabac en réserve dans une petite boîte, car il vaut mieux prévenir que remédier, car sachez que si on lui refuse du pétun,

il fait des siennes.

Il va jusqu’à faire tourner le lait qui bout !

            Une mouche dans la soupe ? Ne cherchez pas, c’est lui le petit malfaiteur.

Les plaisanteries ça va un moment, mais parfois on finit par se fâcher.

            Et je ne vous raconte pas que le Saci fait peur aux poules, les pauvres qui déjà sont naturellement peureuses. Et ne va-t-il pas jusqu’à les terroriser ?

            Mesdames les maîtresses de maison, faites attention car il brule les haricots dans la casserole. Et ce petit coquin se livre à toutes ces facéties soit pour se venger,

soit pour s’amuser et savourer ses espiègleries.

Je vous donne ma parole que j’ai déjà offert beaucoup de pétun au Saci. Si vous ne me croyez pas,

alors je vais vous le décrire :

il porte sur sa petite tête pleine de malice un capuchon d’un rouge agressif, il a la peau plus noire que le charbon dans une nuit sombre,

une seule jambe sur laquelle il sautille

et,

bien sûr,

une petite pipe toujours allumée, car il a, comme moi, la manie de fumer.

Mais une fois, je me suis vengée.

Quand il m’a demandé du pétun, je lui en ai donnée. Mais je l’ai mélangé avec un peu de poudre à fusil (pas trop parce que je ne voulais pas le tuer…).

Et quand il a tiré la première bouffée, BOUM ! la pipe a explosé.

Parce que moi aussi

je suis un petit peu

Saci-Pererê :

c’est lui

en personne

qui m’a appris

à faire des

blagues.

Je préviens le Saci : de grâce ne te venge pas en mettant de la poudre dans ma cigarette, sinon moi je me vengerai en mettant le feu à toute la forêt !

Qu’il se le tienne pour dit !

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